Actualité des livres de géographie & de géopolitique • Le blog de la Librairie La GéoGraphie

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Les géographies, dit le géographe, sont les livres les plus sérieux de tous les livres. Elles ne se démodent jamais. Il est très rare qu’une montagne change de place. Il est très rare qu'un océan se vide de son eau. Nous écrivons des choses éternelles.
Antoine de Saint Exupéry. Le Petit Prince

lundi 29 juillet 2013

Le nouveau numéro de XYZ

XYZ n°135, juin 2013
Saint-Mandé, Association française de topographie, 2013. 72 pages, 21 x 29,7 cm, broché.


Éditorial - Bernard Flacelière
La télé-topographie face à l'insécurité et au terrorisme

Puisque, sans fin, ses travaux font parcourir notre planète au topographe, je ne connais pas de profession plus aventureuse. Il rivalise dans son domaine avec un patron cabotant sur les mers du sud et un célèbre agent londonien du MI6. Rien ne lui est épargné tels les mauvaises rencontres, pannes de véhicule, bivouacs impromptus, larcins et les confrontations avec la soldatesque ou les forces de l'ordre. En revanche rien n'est plus agréable qu'accéder à un endroit magique où aucun touriste n'ira jamais, partager le lait de chamelle dans un campement bédouin, voire pour les plus téméraires, la bière locale d'une gargote cachée au fond d'une obscure ruelle poussiéreuse du quartier africain. La littérature se délecte des aventures des topographes et géodésiens. Les académiciens du Roy au Pérou (« Le procès des étoiles » de Florence Trystram) répondent à la question : la terre est-elle aplatie ou non aux pôles ? Dans « Les Aventures de trois Russes et de trois Anglais dans l'Afrique australe » par Jules Verne les protagonistes, mesurant également un méridien, en viennent aux mains à cause de la guerre de Crimée qui éclate. Dans « la Méridienne » de Denis Guedj, Méchain et Delambre traversent la France et la trouble période révolutionnaire pour définir le mètre. L'AFT, dans ce numéro d'XYZ, n'est pas en reste car elle ouvre ses colonnes à un des trains les plus long et lourds du monde, qui parcourt une zone désertique de la Mauritanie. Le lecteur devenu incollable dans les techniques ferroviaires et de transport de minerai se délectera de la chronique du tunnel de Choum, ou pourquoi creuser un tunnel inutile à cause de la position de la frontière coloniale franco-espagnole. Mais est-ce la fin de l'aventure ? Dans mes pérégrinations professionnelles j'ai travaillé dans de nombreux pays, du Niger au Cameroun, en passant par le Nigeria. La Mauritanie, l'Algérie, la Libye, l'Egypte ont également vu passer mes trépieds, théodolites et autres récepteurs GPS. Vers l'orient, les zones du croissant fertile (Syrie) et de l'Arabie heureuse (Yémen) furent témoins de campagnes géodésiques de grande envergure. Ce qui était possible il y a quelques dizaines d'années – des missions en autonomie complète, sans aucun problème de sécurité – ne l'est plus. Le topographe habite maintenant dans un camp retranché, il est accompagné d'escouades de véhicules militaires et souvent les missions sont ajournées, voire annulées, à cause du risque d'enlèvement ou d'attentat. Tous les pays cités ci-dessus sont désormais en zone rouge ou orange. L'expatrié topographe est devenu une denrée recherchée par les katibas (camps de combattants jihadistes en Afrique du Nord). Aussi il envoie sur le terrain des topographes nationaux, moins monnayables. Son rôle se limite dès lors à faire travailler de loin ses équipes, puis à contrôler a posteriori les travaux effectués, dans la mesure de la bonne réception des résultats. Dans ces conditions, quel sera l'avenir de nos jeunes topographes sans accès possible au terrain, comment se formeront-ils, comment vont-ils acquérir l'expérience puis l'expertise nécessaire aux travaux dans ces contrées ? Certes, l'imagerie issue des satellites d'observation de la terre permet des prodiges, les scènes sont quasi géoréférencées. Mais un écran d'ordinateur, des logiciels de traitement d'images et de SIG remplaceront-ils le terrain et sa réalité ? Cependant nous rappelons qu'un topographe, Pierre Legrand, est toujours sur le terrain. Ce mois de juin 2013, cela fait 1 000 jours qu'il a été enlevé par AQMI au Niger, en compagnie de Daniel Larribe, Marc Fére et Thierry Dole. Une fois encore l'AFT compatit à ce drame et espère un dénouement rapide et heureux à la séquestration (voir l'éditorial du N° 131 de XYZ) Juste retour des choses, je me surprends à imaginer qu'un jeune topographe spécialiste de télédétection mette au point des algorithmes sophistiqués de détection automatique. Puis il analyse sur sa station de travail des séries temporelles d'images spatiales en haute résolution. Ce sont les immenses paysages désertiques de l'Adrar des Ifoghas à Mourzouq. Depuis son bureau, il arrive à dénicher assez d'indices pour faciliter la libération des otages.



Commande :  23 €

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